29.07.2024

La fiscalité des sportifs

La France est devenue une scène sportive internationale.

Hors les évènements sportifs habituellement organisés en France, l’année 2023 a été marquée par la Coupe du monde de rugby et nous accueillons cette année les Jeux Olympiques et Paralympiques.

Le législateur n’a pas ignoré l’évolution du paysage sportif en adaptant une politique fiscale particulière aux sportifs.

Les diverses sources de revenus encaissées par les sportifs sont déterminées selon des régimes fiscaux différents. Les dispositifs tels que notamment le régime d’étalement ou de lissage de revenu ont été mis en place afin de rendre la fiscalité française plus attractive.

I. Le traitement fiscal des revenus tirés de l’activité sportive et des revenus annexes

Les sportifs peuvent percevoir deux types de revenus : des rémunérations au titre de leur activité sportive (1) et des rémunérations tirées de l’exploitation commerciale de leur nom et de leur image (2).

  • 1. Les revenus tirés de la prestation sportive

Le sportif relève d’une catégorie d’imposition en fonction du cadre dans lequel il exerce son activité.

1.1 Le sportif exerçant une activité salariée

Le sportif peut percevoir des rémunérations issues de son activité salariée. Dans ce cas, il est imposé à l’impôt sur le revenu selon le barème progressif et ses rémunérations entrent dans la catégorie des « traitements et salaires » (ci-après « TS »).

Les primes (de matchs joués, de présence, de classement, de qualification et d’intéressement) et la mise à disposition d’avantages en nature doivent également être intégrés dans l’assiette de l’impôt sur le revenu, dès lors que ces sommes octroyées se rattachent à la pratique professionnelle.

Quant aux frais professionnels, ceux-ci pourront être déduits du revenu brut. En effet, le sportif dispose de deux choix : une déduction des frais réels et une déduction forfaitaire de 10 %.

1.2 Le sportif exerçant une activité indépendante

Le sportif peut exercer son activité indépendamment de tout lien de subordination. Ses revenus tirés, tels que les prix, les primes et les cachets, sont imposés dans la catégorie de « bénéfices non commerciaux » (ci-après les « BNC ») au sens de l’article 92 du Code général des impôts.

1.3 L’athlète sélectionné pour les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP)

Lors de la participation aux JOP, les athlètes peuvent recevoir des primes. Ces revenus sont imposables à l’impôt sur le revenu selon les règles de droit commun des « traitements et salaires » [1].

L’athlète présélectionné en vue des JOP peut également bénéficier d’une aide personnalisée allouée par le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) en compensation des pertes de revenus et des dépenses supplémentaires engagées par la pratique de son sport de compétition.

La doctrine prévoit, d’une part, que la fraction de l’indemnité qui compense la perte de revenus supportée est imposable selon le régime des TS. D’autre part, elle prévoit que la fraction qui permet de défrayer les sportifs des dépenses supplémentaires engagées dans leur entraînement et leur participation à des épreuves sportives est susceptible de bénéficier d’une exonération prévue pour les allocations spéciales pour frais en application du 1° de l’article 81 du CGI[2].

  • 2. Les revenus tirés de l’exploitation commerciale de l’image, du nom ou de la voix du sportif

Le sportif, grâce à sa notoriété, peut bénéficier de revenus annexes liés à l’exploitation de son nom, son image ou de sa voix. Par exemple, le sportif qui participe à des manifestations commerciales organisées par l’équipementier de son club perçoit de tels revenus.

Dans ce cas, le sportif ne peut être regardé comme lié à l’association ou à la société sportive par un lien de subordination juridique caractéristique du contrat de travail, et la redevance qui leur est versée au titre de ce contrat ne constitue ni un salaire ni une rémunération versée en contrepartie ou à l’occasion du travail.

Ces redevances, constitutives de la contrepartie d’un service rendu et d’une source de profits susceptible de renouvellement, sont imposables dans la catégorie des BNC à la condition qu’elles ne puissent se rattacher à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus[3].

Ajoutons que ces revenus ne sont pas soumis aux cotisations sociales des revenus d’activité mais aux cotisations sociales des revenus de patrimoine (au taux de 17.2% aujourd’hui).

II. L’assujettissement des sportifs à l’impôt sur le revenu

La détermination de la résidence principale est le point essentiel pour définir dans quel pays le sportif sera imposé (1) avant d’envisager les régimes spéciaux qui bénéficient en France aux sportifs (2).

  • 1. La détermination des revenus imposables

1.1 L’imposition des sportifs ayant leur domicile en France

Le domicile fiscal du sportif est déterminé dans les règles de droit commun.

En effet, l’article 4B du CGI permet de considérer la résidence fiscale dudit sportif par l’utilisation simultanée de plusieurs conditions.

Ainsi sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France :

a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ;

b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu’elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ;

c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.

La détermination de la résidence peut être difficile à apprécier notamment pour des sportifs qui ont une carrière internationale. Les conventions internationales conclues entre les Etats pour éviter les doubles impositions permettent dans certains cas de clarifier leurs situations.

1.2 L’imposition des sportifs non-résidents

Les sportifs non domiciliés en France sont assujettis à l’impôt sur le revenu en France pour leurs seuls revenus de source française.

A la lecture des dispositions de l’article 164 B du CGI, toutes les sommes, y compris les salaires, correspondant à des prestations sportives et fournies ou utilisées en France sont considérées comme revenus de source française.

Il convient également d’admettre que les rémunérations de source française relatives à l’activité d’un sportif résident d’un Etat lié par une convention fiscale avec la France, ne sont imposables en France que si la convention ne s’y oppose pas.

A cet égard, l’article 17 du modèle de convention de l’OCDE prévoit d’attribuer le droit d’imposer les revenus en cause à l’Etat sur le territoire duquel s’exerce l’activité sportive, l’Etat de la source.

Enfin, lorsque la rémunération des prestations fournies par un sportif est versée, non pas au sportif lui-même mais à un tiers, la rémunération correspondant à l’activité dudit sportif en France reste en principe imposable en France.

Au demeurant, lorsque le droit d’imposition est accordé à l’Etat de la source, les rémunérations du sportif liée à son activité réalisée en France supportent une retenue à la source avec un taux minimum d’imposition.

En règle générale les rémunérations sportives, qu’elles soient issues de l’activité sportive ou commerciale, sont imposées à hauteur de 15 %. Toutefois, cette retenue à la source n’est pas libératoire de l’impôt sur le revenu[4], ce qui implique pour les sportifs de déposer l’année suivante une déclaration au titre de ces revenus.

  • 2. Des régimes spéciaux d’imposition en droit interne

Le législateur, prenant en compte la brièveté de la carrière du sportif, a mis en place des dispositifs appréciables quant aux salaires conséquents de ce dernier.

2.1 Le dispositif de lissage de revenu prévu aux articles 100 bis et 84 A du CGI

Afin d’atténuer la progressivité de l’impôt sur le revenu, le législateur a créé un dispositif d’étalement des revenus qui conduit à une imposition sur une base moyenne.

En effet, la combinaison des articles 100 bis et 84 A du CGI permet de lisser les revenus sur une période 3 ans ou 5 ans. L’assiette de l’impôt et la progressivité de l’impôt sont réduites offrant ainsi au sportif une certaine économie d’impôt.

Seuls les revenus du sportif relevant de son activité sportive sont concernés. Par exemple, les revenus de recettes publicitaires sont exclus de ce régime de faveur.

2.2 Le dispositif d’étalement prévu à l’article 163-0 A ter du CGI

L’article 163-0 A ter du CGI prévoit un dispositif optionnel d’étalement des primes versées aux sportifs médailles des Jeux olympiques et paralympique (JOP).

Prévues par le décret n° 2014-298 du 5 mars 2014 relatif à l’attribution de primes liées aux performances olympiques et paralympiques, le dispositif s’applique aux primes :

  • des primes versées par l’État aux sportifs inscrits aux JOP y ayant obtenu une médaille ;
  • des primes versées par l’État aux guides ayant concouru, dans une épreuve des jeux Paralympiques, aux côtés d’un sportif y ayant obtenu une médaille ;
  • des primes versées, par les fédérations sportives délégataires auprès desquelles sont licenciés les sportifs et guides précités, aux personnes ayant participé à l’encadrement, dans la discipline concernée, de l’équipe de France olympique ou paralympique.

Le dispositif permet ainsi d’étaler le montant des primes, au titre desquelles l’option a été exercée, à parts égales sur l’année en cours et les trois suivantes. Il est également possible de cumuler ce dispositif avec le dispositif de lissage prévu à l’article 84 A du CGI[5].

2.3 Le régime des impatriés prévu à l’article 155 B du CGI

Afin de renforcer l’attractivité du territoire national, la France a adopté un régime fiscal de faveur pour les personnes venant s’installer en France (régime dit des « impatriés »).

Ce régime permet aux sportifs qui transfèrent leur résidence fiscale en France, et qui n’ont pas résidé en France depuis au moins 5 ans, de bénéficier pendant 8 ans d’une exonération maximum d’impôt sur le revenu égale à 30 % de leur rémunération[6].

A cet effet, trois conditions doivent être remplies :

  • le sportif doit être appelé à occuper un emploi dans une entreprise établie en France ;
  • il ne doit pas avoir été résident fiscal français au cours des 5 dernières années précédant son installation en France ;
  • sa résidence doit être fixée en France.

Enfin, le sportif bénéficiant de ce régime peut également prétendre à une exonération de 50 % d’impôt sur le revenu au titre de ses revenus de capitaux mobiliers de sources étrangère (dont le paiement est assurée par une personne établie hors de France dans un Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale).

La France offre ainsi de nombreux avantages pour attirer les sportifs professionnels dans ses clubs et fédérations.

Nous vous souhaitons de très beaux Jeux Olympiques !


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